TABLE DES MATIÈRES

L'espace
sensible

Le sentiment de la direction

Représentation de l'espace

Déplacement et changement d'état

Classification des déplacements

Introduction de la notion de groupe

Conséquences de l'existence du groupe

Propriétés du groupe

Continuité

Sous-groupes

Sous-groupes rotatifs

Sous-groupes translatifs

Nombre des dimensions

La notion du point

Discussion de la théorie précédente

Le raisonnement d'Euclide

La géométrie de Staudt

L'axiome de Lie

La géométrie et la contradiction

L'emploi des figures

La forme et la matière

Conclusions

 

 

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DISCUSSION DE LA THEORIE PRECEDENTE

Sans nous attarder à une foule de détails difficiles, voyons en quoi consistent ces associations sur lesquelles repose la notion de place. Nous verrons que nous sommes finalement ramenés, après un long détour, à la notion de groupe qui nous est apparue au début comme la plus propre à élucider la question du nombre des dimensions.

Par quels moyens différentes "places" sont-elles discernées les unes des autres? Comment distinguerai-je, par exemple, deux places occupées successivement par l'extrémité d'un de mes doigts? Évidemment par les mouvements que mon corps a faits dans l'intervalle, mouvements qui me sont révélés par une certaine série de sensations musculaires. Les deux places correspondent à deux attitudes et positions distinctes du corps qui me sont connues seulement par les mouvements que j'ai eus à faire pour changer une certaine attitude initiale et une certaine position initiale à; et ces mouvements eux-mêmes ne me sont connus que par les sensations musculaires qu'ils ont provoquées.

Deux attitudes du corps, ou deux places correspondantes du doigt me paraissent identiques, si les deux mouvements que je dois faire pour les atteindre diffèrent si peu l'un de l'autre que je ne puisse pas distinguer les sensations musculaires correspondantes. Elles me paraîtront non identiques, sans convention nouvelle, si elles correspondent à deux séries de sensations musculaires discernables.

Mais par ces considérations nous avons engendré non un continu physique à trois dimensions, mais un continu physique à un beaucoup plus grand nombre de dimensions; car je peux faire varier les sensations musculaires correspondant à un très grand nombre de muscles et d'autre part je ne considère pas une sensation musculaire isolée, ni même un ensemble de sensations simultanées, mais une série de sensations successives et je peux faire varier d'une manière arbitraire les lois d'après lesquelles ces sensations se succèdent.

Pourquoi le nombre des dimensions est-il réduit, ou, ce qui est la même chose, pourquoi considérons-nous deux places comme identiques, alors même que les deux attitudes correspondantes du corps sont différentes? Pourquoi disons-nous dans certains cas que la place occupée par l'extrémité d'un doigt n'a pas changé quoique l'attitude du corps ait changé?

C'est parce que nous découvrons que, très souvent, dans le mouvement qui nous fait passer de l'une à l'autre de ces deux attitudes, la sensation tactile attribuable au contact de ce doigt avec un objet A persiste et demeure constante. Nous convenons alors de dire que ces deux attitudes doivent être placées dans la même classe et que cette classe doit comprendre toutes les attitudes correspondant à la même place occupée par le même doigt. Et nous convenons de dire que ces deux attitudes doivent encore être placées dans la même classe même quand elles ne sont accompagnées d'aucune sensation tactile ou qu'elles sont accompagnées de sensations tactiles variables.

Cette convention a été inspirée par l'expérience, parce que l'expérience seule nous avertit que certaines sensations tactiles sont souvent persistantes. Mais pour que des conventions de cette espèce soient légitimes, elles doivent satisfaire à certaines conditions qu'il nous reste maintenant à analyser.

Si je place les attitudes A et B dans la même classe et aussi les attitudes B et C dans la même classe, il sÌensuit nécessairement que les attitudes A et C doivent être regardées comme appartenant à la même classe. Si donc nous convenons de dire que les mouvements qui causent le passage de l'attitude A à l'attitude B ne changent pas la place du doigt, et si la même chose est vraie des mouvements qui causent le passage de l'attitude B à l'attitude C, il s'ensuit nécessairement que la même chose est encore vraie de ceux qui causent le passage de l'attitude A à l'attitude C. En d'autres termes, l'ensemble des mouvements causant un passage d'une attitude à une autre attitude de la même classe constitue un groupe. C'est seulement lorsqu'un tel groupe existe que la convention établie plus haut est admissible. A chaque classe d'attitudes, et par conséquent à chaque place, correspondra donc un groupe et nous sommes ici ramenés encore à la notion de groupe sans laquelle il n'y aurait pas de géométrie.

Néanmoins il y a une différence entre le principe que nous discutons ici et la théorie que j'ai développée plus haut. Ici chaque place m'apparaît comme associée à un certain groupe qui est introduit comme sous-groupe S du groupe G formé par les mouvements qui peuvent donner au corps toutes les positions possibles et toutes les attitudes possibles, les situations relatives des différentes parties du corps pouvant varier d'une manière quelconque.

Dans notre autre théorie au contraire chaque point était associé à un sous-groupe S' du groupe G' formé par les déplacements du corps envisagé comme un solide invariable, c'est-à-dire par des déplacements tels que les situations relatives des différentes parties du corps ne varient pas.

Laquelle des deux théories doit-on préférer? Il est évident que G' est un sous-groupe de G et S' un sous-groupe de S. De plus G' est beaucoup plus simple que G et pour cette raison la théorie que j'ai proposée d'abord et qui est basée sur la considération du groupe G' me paraît plus simple et plus naturelle et en conséquence je m'y tiendrai.

Mais quoi qu'il en soit, l'introduction d'un groupe, plus ou moins compliqué, me paraît absolument nécessaire. Toute théorie purement statique du nombre des dimensions donnera lieu à beaucoup de difficultés et il sera toujours nécessaire de se rabattre sur une théorie dynamique. Je suis heureux d'être d'accord sur ce point avec les idées exposées par le Professeur Newcomb dans sa Philosophy of Hyperspace.

Le raisonnement d'Euclide ...

 

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